Goban howto
Bricolage de gobans lourds et contondants ou comment construire un plateau pour le jeu de go avec un bon morceau de hêtre, pas mal de matériel et de papier de verre.
Je rassemble sur cette page des notes, des conseils, des souvenirs, des idées pour la fabrication artisanale de goban. Ce n'est pas à proprement parler un HOWTO, mais plutôt un recueil de souvenirs qui pourraient intéresser quelques personnes, qui sait ?
Vous êtes libres de faire ce que vous voulez de ces informations, des photos, des textes, faites juste attention à ne pas vous blesser :)
Ha oui, aussi, ne reproduisez pas la séquence prise en photo, hein, elle est juste là pour habiller un peu le goban ;)
1. Récupération d'un plateau
Le choix du plateau obéit à plein de règles :
- les qualités de l'essence : la couleur, la texture, le son et d'autres telles que la résistance à la fente, la facilité au vernissage,..
- les qualités du morceau lui même : les dimensions (~50x50cm), l'absence de fente (au moins sur la partie supérieure du plateau.
On trouve difficilement des morceaux de plus de 10cm d'épaisseur dans les menuiseries et les scieries classiques, et encore plus difficilement du kaya, l'essence traditionnelle utilisée pour la fabrication des gobans (d'ailleurs, je ne sais même pas si l'on peut en trouver en France).
J'ai récupéré un morceau de hêtre de 120x60x12cm chez un négociant en bois (DUPUY, La Bachellerie, 24). Le morceau est propice à la réalisation d'un goban itame , c-a-d dont le coeur est au centre du plateau.
(En fait, "itame", ca veut plutot dire "fibres pas tout à fait parallèles". (“itame” puis “masame”, puis “tenmasa”, “tenchimasa”)).
Le hêtre est à priori un bois plutôt intéressant pour fabriquer un goban : il est clair, dense, homogène (coeur et aubier indistinct), résiste assez bien aux fentes, est facile à travailler et supporte de nombreuses sortes d'enduits.
2. Dégrossissage
2.2. Aplanissage des faces avant découpage
Il faut aplanir les faces supérieure et inférieure du futur plateau pour le dégauchissage afin qu'elles puissent servir de guides.
- prendre les mesures et tracer les limites pour le rabotage :
- le rabotage au rabot électrique doit se faire dans le sens de la fibre, régressivement (du plus grossier vers le plus léger) :
- finir par tracer sur une face les limites du plateau aux dimensions du plateau (450x480mm) :
3. Découpage et dégauchissage aux dimensions finales
À partir du morceau aplani, le découpage à la scie à ruban fournit un plateau dégrossi aux dimensions quasi finales:
Le dégauchissage permet d'approcher au plus près les dimensions finales tout en préparant toutes les faces du plateau.
(NB: lors du rabotage, il faut toujours essayer de finir par une face dans le sens de la fibre de manière à ne pas laisser d'éclats dans les angles).
4. Réalisation de la grille du goban
La grille du goban est formée par 18x18 cases (et donc 19x19 lignes) légèrement rectangulaires, supposément pour améliorer la perspective des joueurs.
4.1. Ponçage
Il est important que la face supérieure du goban soit bien plane et lisse pour dessiner la grille.
Avec une grande cale à poncer, poncer dans le sens du bois en diminuant progressivement le grain du papier jusqu'à disparition des traces précédentes (50 = grossier, 80 = moyen, 120 = fin).
NB : L'utilisation d'une grande cale permet de conserver la planéité du plateau.
Il est possible de mouiller un peu le bois entre les ponçages de manière à faire ressortir les veines.
4.2. Pré-traçage
En résumé, les dimensions des différents objets sont les suivants :
Largeur (mm) | Longueur (mm) | |
---|---|---|
Case | 23 | 25 |
Grille | 414 | 450 |
Plateau | 440 | 480 |
- À partir du centre du plateau, positionner les limites de la grille de manière à laisser de chaque coté le même écart avec le bord du plateau. A priori, cet écart doit correspondre à environ une demie pierre.
- Avec un crayon HB ou B (pas trop dur pour ne pas marquer le bois), tracer la grille :
4.3. Rainurage
J'ai choisi de faire des rainures sur la face supérieure du goban en place des traditionnels traits à l'encre. Historiquement, les traits sont traçés avec un sabre oint d'encre …
En effet, cela nécessite de vernir le plateau pour tracer de manière propre (sans coulures, avec des crayons tubulaires) et assurer la durabilité des tracés (résistance au frottement, à la lumière). Or le vernissage d'un tel plateau requiert une certaine expérience et je crains qu'un vernis mal appliqué ou de moindre qualité soit plus un risque de soucis qu'autre chose …
Les rainures présentent les avantages d'une certaine originalité, d'une grande durabilité et d'une régularité plus facile à obtenir.
Notes : j'ai plusieurs idées concernant les possibilités pour faire ressortir les rainures. La première consiste juste à "colorer" avec de la graphite ou équivalent, puis à fixer avec un enduit protecteur (vernis ou huile). La seconde reviendrait à boucher les rainures avec un enduit noir et dur puis de le poncer et de le fixer.
4.4. Finition
Avant de commencer la finition du plateau, il faut finir les rainures, en particulier assurer la jonction des extrémités avec les rainures extérieures.
Une fois les rainures réalisées et bien finies, il est temps de poncer légèrement le plateau avec du papier de finition (du 320 par exemple).
Toujours dans le sens des fibres, repasser toutes les faces avec la grande cale
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5. Les hoshis
Les hoshis sont les 9 étoiles placées sur le goban aux positions (4.4) de chaque angle, (10.4) de chaque coté et au milieu du goban. Je n'ai pas encore trouvé de méthode idéale pour faire ces dites étoiles, mais j'ai pu essayer plusieurs méthodes.
5.1. Emporte pièce
Avec 2 emporte pièces de diamètre 6 et 8 mm, on peut arriver à réaliser une «rainure» circulaire, donc assez homogène avec les rainures du reste du goban. En même temps, le résultat n'est pas très gracieux, puisque le centre du hoshis reste assez vilain (à cause des rainures formant une croix en son centre).
5.2. Marquetterie
Une autre approche consiste à incruster un petit cylindre de 6 à 8 mm de diamètre à l'endroit du hoshis après avoir pratiquer un trou au diamètre adéquat. Le morceau incrusté devra être noir (autre essence, matériel de marquetterie ou autre ?).
On peut ensuite choisir de faire ou non les rainures sur le hoshi fraichement incrusté.
Cette méthode est nettement plus technique que la précédente. Elle nécessite plus de matériel, de savoir-faire mais sera certainement plus propre, plus agréable à l'oeil. Peut être un peu moins cohérente.
5.3. Autres
Restent évidemment d'autres alternatives, qui consisteraient à repérer les hoshis par un point de peinture ou d'encre, par un clou ou assimilés, …
6. Application d'un enduit
6.1. Passage à l'huile de lin
L'enduit à plusieurs rôles à tenir sur le goban :
- protéger et nourrir le bois ;
- faire ressortir et protéger les rainures de la grille ;
- mettre en avant les veines du bois ;
- certains voudront évoquer également la qualité acoustique :P.
L'application de l'huile se fait au pinceau, abondamment selon la «soif» du bois. Après l'application, il est bon d'essuyer l'excédent, de laisser sécher, de re-poncer légèrement ( papier de finition), de ré-appliquer, etc, jusqu'à obtention d'un rendu propre et régulier.
Entre les applications, il peut être bon de renforcer les rainures avec de l'encre noire appliquée au choix avec un tubulaire, un pinceau, une plume … ou encore avec une pointe de graphite. Les couches suivantes viendront fixer l'ensemble par la suite.
J'ai choisi d'utiliser l'huile de lin qui nourrit bien le bois, embellit et fait bien ressortir les rainures. Toutefois, d'autres solutions sont envisageables :
- Le vernis (eau ou acrylique pour le hêtre) qui embellit, protège la surface en la durcissant (son!) mais ne nourrit pas le bois. Le vernis peut être teinté (avec un ajout de colorant).
- Le blanc de céruse qui permet de faire ressortir de manière originale le veinage mais surtout les rainures. Il est possible d'appliquer des enduits avant ou après le traitement pour nourrir et protéger le bois.
- Les huiles de lin, de karité, etc, généralement nourrissantes, permettent de prévenir les fentes, mettent bien en évidence le veinage. Elles peuvent être appliquées en complément d'autres traitements.
6.2. Pyramide (heso)
Certains pensent que creuser le goban protège des mouvements du bois, améliore le son ou permet de receuillir le sang des impertinents.
L'intéret du "heso" est peut etre simplement esthétique.
Je n'ai pas trouvé grand chose sur les dimensions et les angles attendus pour cette pyramide à moitié renversée sur elle même. |\/\/|
J'ai choisi de creuser ce "W" avec des pentes de 45 degrés.
Ensuite, j'ai progressé en plusieurs étapes:
- transposer les guides de coupe sur le goban
- commencer par creuser le long des lignes de quarts, dans la partie centrale
- puis faire les angles
- puis affiner progressivement jusqu'à 45 degrés
- puis détailler, avec un ciseau à 90 degrés
7. Assemblage
Selon les goûts de chacun, il est possible de trouver dans le commerce des pieds qui conviennent pour les gobans en terme de dimension et de look (difficile de faire ou de trouver des pieds traditionnels :/). J'ai trouvé des pieds en hêtre de 8x8x10cm, vissables, pour environ 3-4 euros / pied.
L'optimum serait de conserver des chutes assez grosses pour tourner quelques pieds exactement selon notre bon désir, mais cela demande desmachines et de l'expérience.
Une fois préparés, il ne reste plus qu'à les assembler au goban.
8. Quelques trucs
8.1. Travailler avec les défauts du bois
Le bois, en bon matériau naturel, présente parfois quelques défauts (fentes, noeuds principalement) avec lesquels il faut travailler. Tout d'abord, acceptons que les défauts du bois font aussi son charme, si l'on accepte pas celà, autant travailler avec un bloc de plastique, de contre-plaqué ou encore de marbre reconstitué, garantis à 100%.
Voyons quelques possibilités de workarounds :
- choisir une essence peu sujette aux problèmes cités (kaya, hêtre, etc),
- choisir du bois bien sec (plusieurs années de séchage sont nécessaires pour des morceaux de l'épaisseur qui nous intéressent, mais celà dépend beaucoup des essences),
- choisir la plus belle des faces pour le plateau supérieur (bon, c'est de la triche, OK),
- corriger les défauts corrigeables, par exemple les noeuds abimés, comme indiqué plus bas (à titre d'exemple).
Pour illustrer tout ça, prenons le cas d'un noeud dont le bois commencerait à s'abimer (décomposition) :
- répérer le défaut :
- essayer d'évaluer l'ampleur du défaut :
- nettoyer le noeud :
- effacer le noeud à la défonceuse en pratiquant une entaille de forme facilement reproductible et prendre son empreinte (calque) :
- réaliser un insert grâce à l'empreinte, (possiblement avec la défonceuse dans l'une des chutes du plateau, si possible dans la même zone du plateau (respect de la fibre, de la texture, de la couleur, etc) :
- ajuster l'insert à une dimension très proche de l'entaille, optimalement avec une forme conique, l'enduire de colle puis l'insérer en force (doucement quand même) dans l'entaille :
- essuyer la colle puis poncer rapidement, attendre la prise totale (quelques heures) puis finir le ponçage :
Cette méthode est évidemment loin d'être parfaite bien sûr, mis en choisissant l'insert dans une couleur proche du plateau, on doit pouvoir obtenir un résultat intéressant.